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Raison et Résonance

Raison et résonance – une danse intérieure

Il est toujours réjouissant de voir la science moderne redécouvrir des idées que l’humanité pressent depuis la nuit des temps. Comme si l’intuition millénaire recevait enfin un sceau officiel : la connaissance subtile s’habille de preuves, et cela nous rassure.

À la croisée des neurosciences, de la conscience et de la subjectivité, s’ouvre aujourd’hui une exploration fascinante de notre fonctionnement intérieur. Loin de nous réduire à des machines froides et rationnelles, ces découvertes révèlent combien nous sommes sensibles, complexes, mystérieux — et profondément reliés aux autres, au monde, à l’univers.

Deux grands réseaux cérébraux éclairent ce paysage intérieur :

Deux dynamiques, deux souffles — raison et résonance.

Depuis les années 2000, les neurosciences ont mis en évidence deux circuits neuronaux majeurs. Le premier, bien connu et souvent suractivé dans nos sociétés modernes, est tourné vers l’extérieur. Il régit l’attention focalisée, l’action, la logique, la résolution de problèmes. On l’appelle parfois le réseau de la tâche positive – ou disons ici : réseau raisonnant.

À l’opposé, un autre réseau s’active lorsque nous laissons notre esprit vagabonder : le réseau du mode par défaut (RPD). Il ne fonctionne ni par raisonnement logique, ni par analyse structurée. Il privilégie l’association libre, l’imagerie mentale, la contemplation. Il est le terrain de l’intuition, de la créativité, des éclairs d’inspiration et des processus inconscients. Nos rêveries ne sont pas vaines : elles permettent souvent l’émergence d’idées fulgurantes. Ici, on parle de réseau de résonance.

Ce réseau est aussi au cœur de la mémoire autobiographique. Il agence nos souvenirs, les met en récit, imagine notre avenir. Il s’active quand nous cherchons à comprendre ce que l’autre ressent ou pense — autrement dit, quand nous créons du lien. Et tout cela, il le fait quand nous ne faisons… rien. Quand nous laissons nos pensées divaguer, quand la conscience cesse de vouloir diriger et accepte de se laisser traverser.

Ne rien faire — un art sous-estimé

Dans ce contexte, “ne rien faire” prend une nouvelle valeur. Loin d’être une perte de temps ou un signe de paresse, c’est une régénération en profondeur. Pourtant, notre société valorise l’action, la productivité, l’efficacité. Le repos, le silence, la lenteur sont souvent relégués à l’arrière-plan, voire suspectés.

Et pourtant, c’est justement ce qu’il faut au réseau par défaut pour bien fonctionner :

du temps, du calme, du vide.

Méditation, marche, bain chaud, pause contemplative, respiration, flânerie… tous ces états favorisent son activation. À l’inverse, la surcharge cognitive, le stress ou l’agitation mentale en bloquent les bienfaits.

Ce qui me touche particulièrement, c’est que ces deux réseaux sont en nous. Nous n’avons rien à acquérir, ni à mériter. Ils sont là, embarqués dans notre biologie. Il suffit d’en reconnaître le rythme naturel, comme une respiration : inspire et expire, action et repos, introspection et expression. Le jour et la nuit, le yin et le yang. Ou, comme le dissent les taoïstes : « Un yin, un yang, tel est le Tao ».  Notre cerveau oscille, alterne, trouve son équilibre dans le mouvement entre ces deux pôles.

Apparemment antagonistes, ces réseaux sont en réalité complémentaires. Lorsque l’un s’active, l’autre se met en veille. Notre santé mentale repose sur la fluidité de ce passage, comme un balancier intérieur.

Les chevaux, maîtres de la résonance

Et c’est ici que les chevaux entrent en scène. S’ils nous touchent tant, c’est peut-être parce qu’ils incarnent naturellement cette alternance. Ils savent se rendre pleinement disponibles, puis totalement relâchés. À leur contact, nous apprenons — ou réapprenons — à passer d’une vision focalisée (réseau raisonnant) à une vision panoramique (réseau de résonance).

Un simple changement de regard suffit :

le corps se détend, l’esprit s’ouvre,

et la relation devient authentique.

Ce n’est pas toujours immédiat, bien sûr. Mais progressivement, nous découvrons une autre posture intérieure. En apprenant à alterner entre tension et relâchement, entre action et écoute, nous modifions notre physiologie, notre perception, notre rapport au monde.

Le cheval nous enseigne une chose précieuse :

la véritable puissance naît de l’équilibre entre raison et résonance,

entre faire et être,

entre diriger et accueillir.

Et dans cette danse subtile, c’est toute notre humanité qui se réveille.

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